Le suicide


Quelle réponse donner à ce que nous vivons aujourd'hui ? Avons nous réellement compris le sens de toute cette violence qui s'est répandue par le feu et par la destruction ? Avons nous pris la mesure du message qu'une partie de la jeunesse nous adresse, mettant ainsi en cause le système de gestion de la société, les politiques diverses de "démocratisation" et d'intégration menées depuis près de quarante ans en direction des populations dites de l'immigration ?

Il y a eu certes des volontés. Moult initiatives ont été prises pour construire (reconstruire) ce que certains dans une folie de doctrines avaient décidé de casser (nazisme, colonialisme par exemple).
La redynamisation de l'industrie vouée à la production des biens et des services exigeait la participation d'une main d'oeuvre importante que ne pouvaient plus fournir les seules populations des pays directement touchés par la guerre meurtrière de 1939 à 1945. Il a fallu que l'on recourt à ceux qui aujourd'hui constituent cette population dite d'immigré.
Les hommes et les femmes de cette population sont venus apporter leur contribution à l'effort de redressement, ayant pour la plupart du reste pris part à la reconquête de la paix, alliés à la défense de l'identité et de l'intégrité de la nation de tutelle. Ils ont ainsi contribué à assurer la prospérité et la richesse matériels et économiques des pays hôtes.

Mais il n a pas été tenu, bien souvent, compte de tout ce qu'ils comportent d'entité culturelle. Leur problème de conservation de l'espèce, par exemple, ne semble pas avoir été pris en considération suffisamment à temps. Les effets découlant des rapports qui devaient nécessairement s'établir entre eux et ceux qui le accueillaient n'ont pas suffisamment été étudiés et restent dans la plupart des cas mal compris. Et bien souvent, ils sont restés en marge, ignorés, méprisés, humiliés.
Il est bien évident que les trajectoires d'évolution sociale ne devraient pas être les mêmes pour tous, mais la part de ceux qui ont subi et souffert de frustration et d'isolement est restée proportionnellement plus importante.

Le déficit d'éducation que l'on constate dans cette population s'est vite accru, devant le manque d'intérêt éclairé et des moyens de mis en oeuvre pour aider au développement et à l'épanouissement dans le nouveau milieu devenu de plus en plus exigeant en énergie de travail tant intellectuellement que physiquement.
La concurrence dans l'employabilité étant de plus en plus forte dans un champs économique qui paraît rétréci par la montée des nouvelles techniques et modes de production, nombreux se sont vu poussé au découragement et au désespoir, n'ayant pas suffisamment ou même totalement développé des compétences, de capacités, exigées.
Ce déficit de l'éducation a trouvé son champ d'accroissement dans une sorte de démission générale devant la responsabilité de formation et d'initiation à la vie, qui semble frapper les acteurs gouvernants, qui au nom des principes dits d'émancipation et de modernité, n'ont plus considéré l'éducation des enfants qu'en terme de droits, occultant (par le biais de certaines lois et décrets) l'enseignement rigoureux et équilibré des devoirs.
Tout ceci a largement contribué à asseoir la plus grande majorité de ces populations, devenues citoyennes et partie prenante, dans l'ignorance et l'inconscience du sens de la République. La perception de la devise liberté, fraternité et égalité se trouve ainsi altérée et ne sert plus de moteur, ni de ciment.
Et quand les gens sont dans l'ignorance, non pas que cela ne soit d'aucune façon excusable, il est évidemment incontestable que le seul langage à leur portée est celui de la brutalité. On reste dans le monde du suicide. Dans la zone du nihilisme.
N'ayant plus rien à perdre et poussé dans les derniers retranchements de la misère intellectuelle (tenant inéluctable de la misère économique), leur réaction est inattendue et toujours empreinte d'une violence incontrôlable.
Quand j'entends parler ceux qui sont sensés apporter des solutions à cette situation suicidaire, j'ai peur et j'en tremble de plus belle. Nous ne pouvons plus faire l'économie des moyens pourtant. La réponse répressive reste un amplificateur certain et démolisseur.
Il faut punir certes, mais il serait important d'abord de se poser la question de savoir quelle réponse donner au mal être de ceux que l'on veut sanctionner. Avons nous réellement compris les causes de leur trouble? Pourquoi ont ils choisi de se "suicider" Pourquoi veulent-ils s'immoler au lieu d'user de leur faculté de communication démocratique.
Bien évidemment, il y a les destructions déplorables des biens et des infrastructures, il y a la peur que cela installe!
Quelle responsabilité avons nous dans leur échec et comment pouvons nous les aider à ne pas y succomber?
Parmi cette jeunesse, nombreux sont ceux qui vivent leur situation en terme d'exclusion. Ils pensent que la République à laquelle ils sont sensés appartenir n'accorde le bénéfice de la production économique qu'à une catégorie bien déterminée des citoyens. Cela est le cas quand on les interroge sur l'emploi comme sur l'éducation, donc sur la société. Le nombre de jeunes de 12 à 21 ans qui ont décroché du système est de plus en plus grand et de plus en plus inquiétant.
Il se pose ici la question de l'état dans lequel se trouvera le monde dont ils auront à assurer la gestion dans un avenir, ô combien, si proche.
L’acteur au niveau de l'encadrement de ces jeunes est depuis dépassé par la situation dans laquelle ils se sentent démunis et impuissants. Comment leur parler? Que faire pour leur faire entendre la réalité? Comment assurer son autorité devant cet être en mutation, dans un environnement souvent éprouvant et ardu?
Il est indéniable que les moyens importants ont été déployés pour aider à l'accomplissement de la mission de l'école. Mais les parents entre temps se sont vus confronter à des difficultés d'adaptation et à des règles de plus en plus contraignantes sur le marché du travail.
La plupart de ces jeunes pensent qu'il faut une préférence; la sélection est nécessaire certes mais elle doit se justifier par les capacités à faire, à s'adapter, à répondre et à être soi-même.
Cependant, comment peuvent-ils y parvenir aussi longtemps que les structures mises en place à cette fin restent pour une grande majorité frappées par le désengagement de l'état et de ses organes exécutifs de l'action d'éducation et de formation ? Comment peuvent-ils évoluer dans un cadre urbain où se retrouvent concentrés des populations souvent issues de même origine ayant une forte propension à se renfermer dans des us et coutumes en inadéquation totale avec l'esprit républicain?
La République est une valeur commune dont le bénéfice de la production économique, culturelle, technologique et scientifique devrait profiter de manière équitable à tous ses enfants sans distinction de couleur, ni d'appartenance à un groupe religieux, philosophique ou politique. C'est en cela qu'elle est laïque.
La solution est d'une certaine manière à la portée de toutes les instances. Tous peuvent et doivent y contribuer. A condition de garder à l'esprit l'idée que nous oeuvrons pour une même cause: celle qui mène à plus de liberté et de progrès dans la démocratie.
Nous ne pouvons y accéder qu'en cherchant ensemble les voies d'une socialisation paisible et juste. Que l'on soit de gauche, de droite, du centre ou de l'extrême, il est clair qu'en se jetant la pierre et en clamant chacun dans son petit coin son innocence, nous ne ferons qu'envenimer une situation dans laquelle nous sommes tous responsables.
Contrairement à ce qui a souvent été dit: l'enfer n'est pas toujours l'autre; l'enfer très souvent c'est soi-même.
Il est urgent que les uns et les autres, communistes, socialistes, gaullistes, anarchistes, et j'en passe, s'interrogent honnêtement sur les conséquences des dérives socio-économiques de leurs idéologies; de leurs politiques.
La France ne peut que se réjouir du métissage culturel et social dont elle se réclame. L'admettre c'est donner du sens à une mondialisation basée sur un partage équitable des droits et des devoirs. Elle ne peut prétendre à une place de puissance universelle que si elle ne laisse pas de côté une grande partie de ses ressortissants qui vit dans le doute et le désespoir face à leur identité, leur citoyenneté, leur effort de symbiose. C'est là le point de départ d'une lutte commune et juste contre la "fracture sociale", pour l'égalité des chances.



L'école étant le lieu où doit se construire la citoyenneté, sa laïcité est mis en péril par le manque des moyens de mise en oeuvre du rôle qui lui revient. Il est aussi déplorable de constater que bien souvent elle soit en proie à des interventions d'acteurs inexpérimentés dont les motivations diverses éloignent des objectifs.
Il est temps que l'on sorte de la langue de bois qui consiste à se faire passer pour les meilleurs alors même que l'on fait pire que ce que l'on condamne.
Il est temps de reprendre le dialogue, non pas dans un cadre partisan, mais en redonnant confiance à ceux qui doivent réellement porter la charge d'éduquer la jeunesse. Je pense ici en premier lieu aux parents qui ont le sentiment d'avoir été dépossédé de leur autorité, à l'école qui a besoin de plus de moyens en hommes, en ressources et en infrastructures, aux associations qui ont besoin d'un encouragement logistique et financier pour mener à bien leur rôle de liant du tissu social, aux élus qui doivent répondre aux attentes de plus en plus complexes des citoyens.
Ce ne sont pas les moyens qui manquent à la France. Ce ne sont pas les idées positives non plus. C'est la volonté, la capacité à regarder la réalité sereinement, afin d'y appliquer des réponses efficaces et justes qui permettent de faire entendre la devise de la, République: liberté, égalité, fraternité.

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